Alors mes grands gaillards, vous les ingénieurs, moi qui comptais sur vous pour la gestion de mon blog, je vois bien que vous le lisez à reculons, un texte après l’autre. L’émotion vous submerge…votre petite mère vous étonne, vous vous demandez comment elle fait, mais à chacun son rythme, sa façon d’être, avec votre sœur, pendant notre longue cohabitation, nous avons tellement parlé que nous avons pris beaucoup d’avance. Et puis, vous êtes des hommes, dire ce que vous avez sur le cœur n’est pas pour vous une démarche naturelle, le temps adoucira votre peine.
Mais, vous savez être là quand j’ai besoin de vous, l’important est là.
Comment aurais-je fait le jour du décès de Papa, si vous n’aviez pas été là ?
Un à chaque bras, j’ai pu tout assumer dans la dignité. Toi, mon Thierry, le manager, tu étais avec moi et l’équipe médicale qui, toute bouleversée aussi, nous offrait une petite collation pour nous réconforter. Toi mon Laurent, tu avais besoin d’agir, alors tu es resté avec lui et as vidé sa chambre de toutes nos empreintes. Et puis, nous avons regardé partir son corps en nous tenant la main. Ensemble, au PFI, nous avons réglé tous ces détails pénibles, mais nécessaires.
Je vous avais dit que j’aimerais que vous portiez son cercueil à la sortie de l’église et vous avez eu le courage de le faire. Cette image si forte et si émouvante restera graver dans de nombreuses mémoires.
Vous vous entendez bien, vos différences sont une force car vous êtes très complémentaires et vous lui ressemblez, chacun à votre façon, Thierry, par tes loisirs-passion chasse, pêche, et toi Laurent par ta capacité à bricoler et ta force de travail.
Thierry, malgré ton peu de disponibilités, tu as pris en charge la vente de son 4*4 adoré, tu as compris que je n’en étais pas capable. Nous avons attendu le plus longtemps possible pour le vendre, mais il fallait bien s’en séparer. Dans la cour, la place vide du 4*4 m’a fait réaliser vraiment que Papa ne serait plus jamais en face, chez son copain Gamma, le voisin, entrain de parler, rigoler ou boire l’apéro. En changeant son 4*4 par un autre encore plus beau et plus cher, il voulait tout simplement se faire plaisir et il a eu raison, car il n’était pas du tout dans les apparences, ce n’était pas un homme superficiel. Le départ du 4*4, cette transaction matérielle a été pour moi douloureuse, car je venais de prendre conscience qu’une page de vie venait de se tourner...
Tu m’as aidé aussi à trouver la bonne personne qui saura bien s’occuper de Pilou, le chien de Papa. Pilou, cet épagneul breton, cette boule d’affection qui se transformait en tornade, en faisant une bêtise chaque jour dès que je m’absentais. Avec ce gentil chasseur, il trouve ce que je ne pouvais pas lui donner, et je suis libérée d’un grand poids.
Ton père aurait été si fier de toi, Thierry, lorsque devant plus de 500 personnes aux Signaraux, tu as défendu tes valeurs qui étaient siennes. Tu as mis au service l’association Senépi, nature durable, les qualités que tu développes dans ton activité professionnelle. Grâce à toi, votre juste combat est entrain de se gagner ! Ton long discours était brillant, à la fois convainquant, argumenté, structuré, et émouvant. Autour de moi les gens disaient : «mais qui est cet homme qui parle si bien» et moi, la tête dans les étoiles de dire, « c’est mon fils ! ». Comme ton père, tu as la pudeur de tes sentiments, mais je les devine de plus en plus. Tu étais mon premier enfant, et moi non plus, je n’ai pas toujours su te montrer et te dire. Tu aurais aimé lui parler davantage, mais il n’était pas si facile de dialoguer avec lui, cependant il savait. Dépasse ton gros chagrin, vis pleinement ta vie, tu as fait tout ce que tu pouvais pour lui. Ton épouse, notre très belle Sylvaine a su trouver les mots qu'il fallait pour les enfants, durant toute la longue épreuve et après. Elle a su les informer tout en les protégeant. Aujourd'hui, comme j'ai pu reprendre ma place auprès d'eux, je me rends compte de ce beau travail quand je les entends évoquer leur Papy, ils ont déjà du recul, ils sont dans la tendresse, les bons souvenirs qui aident à grandir.
Lolo, tu es exceptionnel, le gentil des gentils, tu es toujours à mon écoute, tu fais tout ce que tu peux pour me faciliter la vie. Très présent avec ton père, tu te montrais positif pour me donner des forces.
Tu m’as accompagnée à Briançon de nombreuses fois et dormait même souvent une nuit pour que mon séjour soit un peu moins dur. Le col du Lautaret dans la tempête, tu connais !
Tu ne t’économises jamais pour moi, je fais partie de tes priorités. Toi mon Lolo, j’hésite avant de te dire ce qui ne va pas, parce que je sais qu’après que tu n’as qu’une hâte, c’est de remédier à tous mes problèmes pour que ma vie soit la plus douce possible et moi, Je trouve que je t’accapare déjà de trop.
Heureusement, nous avons de la chance, tu as une petite femme en or qui accepte la grande place que tu m’as faite dans ton cœur parce qu’elle a bien compris que plus on aime, plus on est capable d’amour ; et sa place à elle avec celles des beaux enfants qu’elle t’a donnés est immense ! Le mardi, je garde ton bébé, mon petit ange blond, alors tu viens déjeuner avec moi, mais tu te dépêches de manger pour t’occuper de ma maison, de la maintenance de l’ordinateur, au portail qui grince, tu n’oublies rien ; merci de mettre tout ton savoir-faire à mon service. Tu me fais bénéficier des nouvelles technologies que tu maîtrises parfaitement, tu m’inities, mais essaie d’aller un peu moins vite, mes neurones ne sont plus tout neufs !
Tu as décidé aussi de prendre en charge la maison de ta sœurette, célibataire, ainsi que celle de ta tante Ginette. Tu as le sens de la famille, et tu lui aide à ta façon à accepter l’absence du tonton Roger. Et c’est beaucoup !
Tu es si modeste que l’on pourrait penser que tu n’es qu’un manuel hors pair, pourtant, tu as aussi dans un tiroir un doctorat en sciences physiques nucléaires, et en privilégiant ta vie privée, tu sais où se situe ton bonheur. Papa poule, quand notre petite Pauline dit « je veux mon papa Lolo », l’heure est grave, et moi je sais bien que je ne peux plus rien pour elle alors quand tu l’attrapes au vol et la prends dans tes bras costaux, tous ses gros chagrins s’envolent par magie. Voir sa jolie frimousse qui passe si vite des grosses larmes aux rires éclatants me ravit !
Avoir deux fistons tels que vous, quelle force pour moi, l’épreuve aura, au moins, été un révélateur de notre richesse familiale.